Continuons notre preview des festivals avec une chanson idéale en guise de rafraîchissement bienvenu en ces temps caniculaires. « Ti Amo » de Phoenix tombe à point et avant que le groupe français le plus international n’attaque une imposante tournée des grands rendez-vous de l’été (il sera aux Eurockéennes le 9 juillet après être passé par Montreux et avant Musilac, entre autres), il a sorti ce sixième album, forcément très attendu. J’avais déjà écrit tout le bien que je pense de Phoenix avec « 1901 » (SOTW #59).
Pour le coup, « Ti Amo » diffuse une ambiance estivale pop habillée d’une imagerie un peu rétro et nostalgique, celle d’une Italie balnéaire des années 70 et 80, des plages de l’Adriatique et des shows télés clinquants, de la musique cool et populaire de Lucio Battisti, sans pour autant tomber dans la citation vaine ou la caricature. De moins en moins redevables au rock anglo-saxon, les Français osent les textes multilingues, avec évidemment de l’italien (lieu de vacances d’enfance des frères guitaristes Branco et Christian Mazzalai, racines de l’épouse de Thomas Mars, Sofia Coppola) et plus étonnement du français, tant Mars n’avait jamais rien écrit dans sa propre langue. Musicalement, le groupe enfonce le clou de la mutation sonique opérée avec « Bankrupt », les guitares et les divers synthés s’entremêlant au point qu’il est parfois difficile de les distinguer, les rythmiques créées à partir de la matière enregistrée par le batteur de tournée Thomas Hedlund et appuyées par une basse de plus en plus synthétique. La voix de Thomas Mars, quant à elle, ose les effets, les filtres et les harmoniseurs pour un résultat plus que convaincant. On sent pourtant ça et là des influences nouvelles, comme ce sample de Fela dans « Fleur de Lys », la fixette sur la disco italienne ou l’appropriation du rock des Strokes des années 2010 comme dans l’excellent « Telefono ».
« Ti Amo », le morceau-titre, est le plus ouvertement disco de l’album. Les syncopes percussives rappellent les rythmiques qu’on trouvait chez Prince (énorme influence, tout au moins dans leurs coeurs de fans) dans les années 80, la mélodie entraînante, les choeurs funky en fausset, les effets dissonants au sein d’une matière sonore luxuriante devrait faire de la chanson l’un des tubes de l’été ici et ailleurs. Et malgré son titre cheesy, « Ti Amo » n’est pas une bluette romantique. Au contraire, c’est une tentative de séduction désespérée, et pas très légère, pour avoir quelqu’un qui ne veut pas… Le sous-texte est donc beaucoup moins souriant et ensoleillé qu’il ne paraît. Comme la musique de Phoenix, qui diffuse quand même une vraie mélancolie.
J’attends avec impatience leur show aux Eurocks (avec un spectaculaire miroir en fond de scène), en attendant, je sirote des citronnades glacées en me gargarisant de ce « Ti Amo ».
Live « Black Box Sessions », version « intimiste » très intéressante :
Live at Jimmy Kimmel’s :