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On The Rocks #11

Queens_of_the_Stone_Age_Lullabies_to_ParalyzeEn 2005, Queens of the Stone Age est attendu au tournant. Le super groupe vient de jouer son « Songs for the Deaf » sur la scène des plus grands festivals mondiaux. Derrière les fûts, Dave Grohl vient donner un petit coup de main à son vieux pote Josh Homme, qui s’impose peu à peu comme le musicien le plus visionnaire de sa génération. Sur le quatrième disque des Californiens, le chanteur-guitariste rouquin semble montrer à la terre entière qu’il a fini de digérer son adolescence à maltraiter sa pédale de distorsion avec Kyuss. Décidé à la jouer plus fine, Homme abandonne le heavy pour se consacrer pleinement à la pop. Car oui, Josh Homme est un monstre pop, un génie du songwriting et un arrangeur hors pair qui sait plus que bien s’entourer (on retrouve Alain Johannes, Mark Lanegan de Screaming Trees et … Billy Gibbons de ZZ Top sur « Lullabies To Paralyze ). Dans son Rancho de la Luna perdu au milieu du désert de Mojave, entre Joshua Tree et la frontière mexicaine, Homme peaufine ses hymnes pop aux abords biscornus et parfois dissonants. Sa nouvelle obsession? Frapper fort sans jamais tomber dans la lourdeur. Les chansons sont plus fines (« In My Head », « Little Sister »), plus élaborées («You Got A Killer Scene There, Man… ») que sur les disques précédents. Faire appel à Joey Castillo à la batterie s’avère être un choix gagnant. Il régale sur les entêtantes « Burn The Witch », « Tangled Up In Plaid » et « Everybody Knows That You’re Insane », faisant presque oublier les piges de l’ex-batteur de Nirvana. Sombre, parfois intimiste, « Lullabies To Paralyze » est un coup de maître qui fait passer les Reines de l’âge de pierre de statut d’outsiders à celui de plus grand groupe du monde. Oui, plus grand groupe du monde. Vous m’avez bien lu. Après « Rated R » et « Songs For The Deaf », Queens of the Stone Age vient clore une des trilogies les plus puissantes de l’histoire du rock. Tout simplement imbattable.

Année : 2005
Origine : Etats Unis
Pépite : « Tangled Up In Plaid »
Eat : Burrito au poulet
Drink : Une bouteille de Mezcal El Buho

 

Arcade_Fire_-_The_SuburbsUn disque avec une saveur particulière. Chaque fois que j’écoute « The Suburbs », je me replonge dans ce mois de janvier 2011 passé sur la côte Est des Etats-Unis à faire de la recherche à la fac. Seul, j’avais chargé mon iPod de musique mais suite à une mauvaise manipulation, seul le troisième album d’Arcade Fire était lisible dans le lecteur. Un mois glacial, marqué par des chutes de neige, du blizzard, et des aller-retours incessants entre New York, Philadelphie et la Bibliothèque du Congrès américain à Washington DC. Bizarrement, cela ne pouvait pas mieux tomber. « The Suburbs » raconte l’Amérique moderne, celle des banlieues de classe moyenne qui bordent chaque métropole du continent. Elle replonge l’auditeur dans son enfance de petit garçon blanc épargné par la misère et les émeutes raciales. Je me revois à attendre ma correspondance sur le parking d’un terminal Greyhound à Baltimore, dans le Maryland, au son de « Month of May ». Il tombait d’épais flocons sur la ville de The Wire. Bizarrement, le ciel avait calqué le rythme de la neige sur le tempo du batteur ontarien Jeremy Gara. Avec un talent hors norme, la joyeuse bande établie à Montréal jongle entre pop sophistiquée (« We Used To Wait », « Deep Blue ») et rock taillé pour les stades (« Ready To Start », « Modern Man »). Petits protégés du grand David Bowie, dont le titre éponyme rappelle les meilleurs épopées, Arcade Fire finissent par abandonner leur image de nouvelles icônes de la coolitude gluten free pour pondre un concept album à la symbolique sociale et historique solide. Une chronique d’une période candide dans un monde vorace, contée avec brio par le charismatique Will Butler. La finesse des arrangements, la versatilité des titres (comment ne pas danser sur le très disco « Sprawl II », comptine teintée d’ironie contre les centres commerciaux démesurés qui pullulent dans les banlieues calmes) et la qualité du songwriting en fond une oeuvre majeure du rock contemporain. Pas étonnant qu’il ait raflé le Grammy Award du meilleur album alternatif de 2010.

Année : 2010
Origine : Canada
Pépite : « The Suburbs »
Eat : Pancakes au sirop d’érable
Drink : Bière La Fin Du Monde

 

Misfits_-_BulletLes Misfits sont sans aucun doute les grands perdants du punk rock américain. Trop trash, trop politiquement incorrects, trop décalés, la bande à Glenn Danzig reste pourtant un des membres fondateurs d’un mouvement qui continue de faire crasher des milliers de gens sur l’establishment et les bonnes manières. Au départ, « Bullet » devait faire l’objet d’une sortie album. Malheureusement, le mépris des maisons de disques a eu raison du projet initial. Les New Yorkais décident donc de lancer la chanson sur un single accompagné de trois autres titres. Sous une pochette mettant en scène l’assassinat de John F. Kennedy, thème principal du single, sort « Bullet » en juin 1978. Terriblement violent, l’hymne punk éponyme décape : « Texas in an outrage when your husband is dead / Texas is an outrage when they pick up his head / Texas is the reason why the President is dead / You gotta suck Jackie suck ». Voilà, c’est dit. Pas étonnant qu’aucun label n’ait levé le doigt pour distribuer cette décharge malsaine. Sur « We Are 138 », les Misfits inventent le punk rock mitraillette. Quatre accords, un refrain à beugler jusqu’à se déchirer les cordes vocales, la recette parfaite pour faire sautiller des armées de jeunes marginaux en manque de sensations fortes et les convaincre de claquer leurs économies chez Walmart pour s’acheter une guitare et monter un band. Après tout, le punk rock, c’est pas bien compliqué. C’est qu’une question d’« Attitude », autre moment phare de ce 45 tours de moins de huit minutes au total. « Hollywood Babylon » clôt cette danse macabre sous des faux airs de psychobilly. Créateurs d’un look inégalé, premières légendes du « horror punk », les Misfits n’ont jamais fait mieux que ce single fédérateur. Cela poussera même son chanteur à tenter l’aventure en solo, avec plus ou moins de succès. « Bullet » est l’âme de cette bande de renégat, dont le logo en forme de tête de maure continue d’orner les t-shirts des adolescents rebelles aux quatre coins du globe.

Année : 1978
Origine : Etats Unis
Pépite : « Bullet »
Eat : Peanut Butter Cookies
Drink : Bavaria 8°6