Place à un peu de littérature historique pour continuer notre voyage, en passant par un épisode douloureux mais fondateur de la nation américaine. Robert Olmstead nous plonge, grâce à un récit initiatique et mystérieux, au coeur de la Guerre de Sécession, avec son roman Le voyage de Robey Childs.
Le fil conducteur de l’histoire, c’est le périple qu’entreprend Robey Childs, jeune garçon que sa mère a investi d’une mission : retrouver son père, soldat parti combattre dans une guerre trop grande pour lui. Accompagné d’un pur sang noir presque surnaturel, le héros va grandir, mûrir, devenir un homme, tout cela dans un monde en plein chaos, où l’homme ne sert que de chair à canon, faisant ressortir les plus bas instincts de chacun, et où l’humanité n’en est que plus fragile.
L’écriture très fluide d’Olmstead permet une immersion immédiate dans son récit, qui nous tient en haleine tout du long. L’auteur sait à merveille comment nous transporter dans l’Amérique meurtrie de 1865, et les évocations de paysages sont sublimes, sauvages, cruelles, magnifiques ! La mort qui rôde ne fait que ressortir de manière encore plus vive les interrogations du personnage principal (mais également les nôtres) sur la vie. Une grande partie de l’action se déroule en Pennsylvanie, juste pendant la bataille sanglante de Gettysburg, dont les références épiques nous plongent dans la fureur et la cacophonie d’un moment de l’Histoire de l’Amérique où plus de 600 000 vies furent perdues.
La beauté du Voyage de Robey Childs, c’est également de ne jamais tomber dans le manichéisme. C’est tout juste si l’on arrive à identifier le « camp » dont fait partie Robey (Confédération ou Union ?) et au final, on comprend rapidement qu’il est juste un observateur extérieur qui va commenter cette page de l’histoire, mais aussi la nature humaine qui se présente alors à lui, nue et crue, parfois veule, mais jamais réellement méchante.
Ce roman puissant est d’une crudité et d’une cruauté qui sont autant égales à sa beauté et sa générosité. Ce n’est donc pas pour rien que Le Voyage de Robey Childs a reçu le Heartland Prize for Fiction et le Ohioana Award. La grosse (mauvaise) surprise, c’est d’apprendre que ce livre est le premier et seul roman traduit en français de Robert Olmstead ! J’ai hâte que d’autres de ces écrits trouvent écho dans l’Hexagone.
Le voyage de Robey Childs (Coal Black Horse)
Robert Olmstead
2014 pour la traduction française, 2007 pour la version originale
Gallmeister