Oldie but goldie… Je suis retombé sur cette perle en visionnant l’excellent DVD du show de Lou Reed, quand celui-ci joua l’intégralité de son chef d’oeuvre « Berlin » sur scène à New York en 2006, avec rien moins que Steve Hunter, le guitar hero qui officia sur ce disque, et rien moins que Sharon Jones (savoureuse chanteuse soul) et Antony (voix angélique d’Antony & the Johnsons) aux choeurs. « Candy Says« , reprise en rappel m’a alors complètement transporté, et ce fut une vraie découverte car il ne l’avait pas jouée aux Nuits de Fourvière (l’un des concerts vraiment mémorables de ma vie) lors de la même tournée…
On a tendance à oublier que le Velvet Underground excellait dans les ballades. En effet, on résume souvent le style de Lou Reed, John Cale, Mo Tucker et Sterling Morrison à un rock garage, volontiers dissonant et agressif. C »est souvent vrai, mais le Velvet, ce sont aussi ces ravissantes miniatures de pop de chambre telles que « Sunday Morning », « I’ll Be Your Mirror », « Pale Blue Eyes » ou justement « Candy Says ». Ouvrant le troisième album titré simplement « The Velvet Underground » , en 1969, « Candy Says » surprend car elle est chantée par le nouveau bassiste du groupe, Doug Yule, invité par Lou Reed (à qui il ressemblait comme un frère) pour remplacer John Cale, parti vers de nouvelles aventures. Sa voix douce, contrastant avec celle, plus sardonique, du chef est en effet plus adaptée pour transcrire la mélancolie et la douceur de la mélodie.
« Candy Says » parle ou plutôt fait parler une star de la Factory d’Andy Warhol, l’actrice et performeuse Candy Darling, qui s’est également fait remarquer car elle fut l’une des premières transsexuelles médiatisées. Candy Darling est morte d’un cancer à 29 ans, en 1974. Le texte est une petite merveille de pudeur, dont je ne résiste pas de vous proposer une traduction, forcément à l’arrache…
Candy says I’ve come to hate my body
And all the things that it requires in this world
Candy says I’d like to know completely
What others so discreetly talk about
I’m gonna watch the bluebirds fly over my shoulder
I’m gonna watch them pass me by maybe when I’m older
What do you think I’d see if you could walk over from me?
Candy says I hate the quiet places
That cause the smallest taste of what will be
Candy says I hate the big decisions
That cause endless revisions in my mind
Candy dit « J’en suis venue à haïr mon corps
Et toutes les choses qu’il m’impose dans ce monde »
Candy dit « J’aimerais tout savoir
De ce que les autres se racontent si discrètement »
« Je vais regarder les oiseaux bleus s’envoler au dessus de mon épaule
Je les regarderai passer au loin peut-être quand je serai plus vieille
Que penses-tu que je verrais si je pouvais m’évader de moi? »
Candy dit » Je déteste les endroits calmes
qui provoquent un tout petit avant-goût de ce qui adviendra »
Candy dit « Je hais les grandes décisions
qui provoquent des questionnements sans fin dans mon esprit ».
Si Antony Hagerty a la voix (et le sexe?) des anges, notons qu’il reprend toujours cette chanson sur scène. Ce n’est donc pas étonnant que Lou Reed l’ait convié à partager le chant avec lui sur cette chanson. La pochette de son premier album « I Am A Bird Now » (on reste dans la thématique) est la photo très connue de Candy Darling (parfaitement maquillée) sur son lit de mort.
Version album ci-dessus (1969, chanté par Doug Yule)
Live tournée « Berlin » (2006, chanté par Antony Hagerty & Lou Reed) :