On The Rocks #6

FIDLARAu début de la décennie, on ne pouvait rêver mieux pour nous rappeler que les refrains qui transpirent la bière chaude et le teenage rock américain n’étaient pas encore prêts à disparaître à tout jamais de nos platines. « Fuck It Dog, Life’s a Risk », autrement dit FIDLAR, a relevé ce défi avec brio. Ces quatre énervés de Los Angeles, nourris à Black Flag, aux Stooges et au punk à roulette de leurs enfance (Blink 182, The Offspring, et NOFX, pour ne citer que les plus prestigieux), ont pondu un des albums les plus frais de notre ère. Des riffs efficaces, des refrains qui restent dans la tête et une attitude de crétins  pré-pubères à faire passer Johnny Knoxville pour un prix Nobel d’astronomie. Les titres, qui pour la plupart tournent autour de sujets aussi universels que le manque de dope, la picole à outrance et le stress permanent du découvert bancaire, séduisent par leur simplicité et leur spontanéité. Esprit punk, son punk, vie punk, voilà de quoi donner envie à n’importe quel adolescent ricain de vendre ses pompes de foot pour aller acheter une guitare et faire danser ses potes dans son garage. Lorsque dans vingt ans, on se souviendra de la scène garage lo-fi californienne du début des 2010s, il y a fort à parier que ce disque soit tout en haut de la liste des incontournables de sa génération. « Wake Bake Skate », « No Waves », « Paycheck » et la très explicite « Cocaïne » résument à elles seules l’esprit dans lequel se trouve cette jeunesse californienne qui a grandi avec son sachet de weed vendu en pharmacie et les disques de pop-punk de ses aînés. Ceux qui ont pris leur pied sur American Pie et qui collectionnent encore les casquettes à l’effigie d’obscures équipes de baseball devraient apprécier.

Année : 2012
Origine : Etats-Unis
Pépite : « No Waves »
Eat : Breakfast Burrito
Drink : un fût entier de Bud Ice

 

TERRY REIDTerry Reid a choisi l’anonymat. Il a tracé sa route seul. Son « Seed of Memory » aurait pu être un vrai carton commercial. Mais quand on est maudit, on le reste jusqu’au bout. Après tout, peut-on vraiment en vouloir à un mec qui a refusé deux fois de faire partir de Led Zeppelin et Deep Purple au début des 1970s ? Car du talent, Mr Reid en regorge. Une voix soul, des textes inspirés, et un vrai sens de l’arrangement. Tout pour jouer dans la cour des grands. Produit par son compatriote Graham Nash (The Hollies, puis Crosby, Stills and Nash), « Seed of Memory » oscille entre folk hippie et southern rock de haute voltige. Le disque est sublimé par la présence de Ben Keith à la slide guitare, qui a pu se faire la main sur « Harvest » et « On The Beach » de Neil Young, et David Lindley (Ry Cooder). Lancé en 1976, puis réédité en 2004, « Seed of Memory » est une de ces perles cachées du rock. Un album taillé pour la route et les grandes prairies à perte de vue de l’Ouest Américain (la sublime« Faith To Arise » ou la très solide « Way You Walk »). Reid sait aussi se montrer intimiste , comme sur la magnifique ballade de « To Be Treated Rite », et la grandiose chanson éponyme « Seed of Memory ». C’est à se demander comment cet album n’est pas arrivé numéro un des charts à sa sortie. Pas étonnant que le réalisateur-shock rocker Rob Zombie ait dépoussiéré deux titres du disque pour son mythique roadmovie d’épouvante « The Devil’s Rejects » en 2005. Du grand art.

Année : 1976
Origine : Royaume-Uni
Pépite : « Seed of Memory »
Eat : Mashed potatoe and gravy
Drink : Four Roses on Ice

 

VON BONDIESAvec leur deuxième disque, les Von Bondies n’ont fait que confirmer que Detroit était bel et bien la capitale du rock n’roll américain en ce début de 21ème siècle. Moins blues que les White Stripes, plus sexy que les Dirtbombs, le quatuor mené par l’insolent guitariste-chanteur Jason Stollsteimer a sorti l’un des disques de garage rock les plus solides et pittoresques de son époque. Boosté par les choeurs féminins de Carrie Ann Smith (basse) et Marcie Bolen (guitare), « Pawn Shoppe Heart » est un déluge de hits urgents et électriques, à classer entre The Cramps, T-Rex et les New York Dolls. Au fil des douze titres qui composent l’album du gang du Michigan, la voix accrocheuse et acide de Stollsteimer résonne sur des riffs glam rock des plus percutants (« No Regrets », « Tell Me What You See », « Fever », « Pawn Shoppe Heart »). Du rock n’roll qui sait rester léger tout en étant incisif, la formule est imparable. Et puis comment évoquer cet album sans mentionner son hit ? Deux minutes et quatorze secondes de rock incendiaire, l’inoubliable « Come On Come On » et son refrain qui n’en finit jamais. Voilà de quoi faire rentrer les Von Bondies au panthéon des meilleurs bands du Motor City. Cela aura d’ailleurs valu un oeil au beurre noir au frontman après un méchant accrochage avec Jack White dans un bar local. La rançon de la gloire.

Année : 2004
Origine : Etats-Unis
Pépite : « Come On Come On »
Eat : Mozzarella Sticks
Drink : Vesper (Martini, vodka, lillet).