On The Rocks #16

Jimi_Hendrix_-_Electric_LadylandPersonne ne résume mieux les années 1960 que Jimi Hendrix. Le natif de Seattle a popularisé la six cordes aux quatre coins de la planète en donnant un bonne dose de folie au blues. Architecte d’un son et d’une dégaine hors du commun, le gaucher aux origines afro-américaines et Cherokee a su conquérir le tout « Swinging London », reléguant ainsi le « dieu » Eric Clapton de Cream à la seconde place du classement des meilleurs guitaristes de l’époque. Beaucoup voient en Hendrix le guitar hero ultime, capable de faire hurler sa Stratocaster comme personne. Le « Voodoo Child » est bien plus que ça. Chanteur hors-pair, arrangeur de génie, il a su transformer son blues en une pop musclée et inspirée, résumant à elle seule la décennie musicale la plus créative de l’histoire. Sur « Electric Ladyland », son troisième et dernier album studio, Hendrix touche à tout. Il expérimente le funk sur la très groovie « Crosstown Traffic », plonge les deux mains dans le hard rock sur le riff de « Voodoo Child (Slight Return) », et se permet même de reprendre Bob Dylan en signant une interprétation magistrale de « All Along The Watchtower », parue un an plus tôt sur l’album « John Wesley Harding ». « Electric Ladyland » s’écoute comme un voyage psychédélique au coeur des sixties. Lassé humainement et musicalement de son bassiste Noel Redding, Hendrix décide alors d’empoigner la quatre cordes sur la plupart des morceaux de l’album et se montre d’un perfectionnisme radical. A la recherche du son parfait, il s’arme d’une multitude d’effets et n’hésite pas à s’y reprendre à 43 reprises afin d’immortaliser « Gypsy Eyes ». Peu après la sortie du disque, Hendrix abandonnera peu à peu ces aspirations pop pour s’enfermer dans des jams à n’en plus finir qui marqueront le déclin d’un des artistes les plus singuliers de sa génération. « Electric Ladyland » reste l’oeuvre la plus ambitieuse de celui sans qui nous n’aurions jamais eu Prince, Lenny Kravitz ou Josh Homme, trois de ses adeptes les plus fameux. Hautement recommandé.

Année : 1968
Origine : Etats Unis
Pépite : « Crosstown Traffic »
Eat : Steak de bison
Drink : Red Stripe Lager

 

D4_6twentyAu début des années 2000, l’Australie et la Nouvelle Zélande se sont imposées comme un des viviers à groupe de rock les plus importants de la nouvelle scène garage. The D4 font partie de cette horde de jeunes excités nourris à la pédale fuzz, aux riffs incisifs et à l’énergie débordante. Largement influencés par le punk new yorkais du CBGB (Ramones, Johnny Thunders), le son brut des Kinks et des Small Faces (auxquels ils vouent un véritable culte), The D4 surfent sur la vague du renouveau du rock pour sortir un des albums les plus explosifs de ce début de siècle. Rien de bien nouveau, deux guitares aiguisées, des tempi à 100 km/h et un chant insolant, la recette idéale pour convaincre David Letterman d’inviter le groupe kiwi à New York pour mettre le feu au plateau de sa très célèbre émission. Avec « 6Twenty », le quatuor originaire d’Auckland s’offre un semblant de renommée et vient même partager la scène de la Boule Noire à Paris en 2002 avec leurs compatriotes de The Datsuns. Il faut dire que le disque est une mine de tubes garage punk tous aussi accrocheurs les uns que les autres. L’album ouvre en grande trombe avec le très explicite « Rockn’Roll Motherfucker », suivi de « Party » et « Come On », deux sérénades qui auraient facilement pu se retrouver dans la bande-son d’une publicité pour de la bière bon marché. Le groupe emmené par Jimmy Christmas et Dion Lunadon (qui officiera ensuite dans True Lovers et A Place To Bury Strangers) s’offre même le luxe de reprendre « Pirate Love » des Heartbreakers, « Invader Ace » des japonais déjantés de Guitar Wolf,  et « Mysterex », sombre tube des Scavengers, premier groupe de punk néo-zélandais a avoir rencontré une certaine renommée durant la deuxième moitié des seventies. L’album, qui ne dépasse pas quarante minutes, fini en beauté avec « Exit To The City » et la power ballade « Heartbreaker ». Plus de quinze ans après sa sortie, « 6Twenty » continue d’impressionner les fans de garage rock primaire par sa fraîcheur et la qualité de ses titres. Une oeuvre méconnue dont le vinyle est aujourd’hui malheureusement en rupture de stock.

Année : 2001
Origine : Nouvelle-Zélande
Pépite : « Heartbreaker »
Eat : Pepperoni Pizza
Drink : Un pack de Red Lion

 

nebula-to-the-centerC’est un ami fan de jazz qui avait dégoté « To The Center » dans un vulgaire magasin de disques d’occasion de province. Il s’était laissé séduire par la pochette énigmatique de cet album montrant une scène vide perdue au milieu du désert californien. Il n’avait pas eu tort. L’armée d’amplis Marshall présente sur la couverture donne le ton. Oui, Nebula ne fait pas dans la dentelle. Le power trio propose un rock heavy avec des forts accents psychédéliques, et ça s’entend dès les premières notes du morceau éponyme de l’album. Imaginez Black Sabbath, Hawkwind et Iggy Pop and the Stooges contraints d’improviser pendant des heures sous le soleil brûlant du désert de Mojave. Le résultat est un véritable déluge de fuzz et de wah-wah, soutenant le chant halluciné d’Eddie Glass (ex. Fu Manchu) dont l’intonation rappelle étrangement celle d’Ozzy Osbourne au début de sa carrière. Sur la succulente « Freedom », ces rockeurs nourris au jus de cactus décident de conquérir de nouveaux horizons en s’équipant d’une cithare, comme l’avait fait leurs potes de Monster Magnet quelques années auparavant sur l’excellente « Black Balloon » de 1993. Si Nebula fait dans le lourd, il y a fort à parier que le proto punk ait également laissé des traces dans le passé musical du combo. « Clear Light » rappelle le MC5, et lorsqu’il s’agit de reprendre « I Need Somebody » des Stooges, la bande à Eddie Glass y met tout son cœur, signant une des covers les plus marquantes du groupe des frères Asheton. Si Truckfighters, Graveyard et Red Fang ont autant de succès aujourd’hui, c’est grâce à des disques de ce calibre, a mi-chemin entre le psychédélisme des Doors, le punk de Detroit et la puissance de Sabbath. A consommer sans modération, avec le volume à balle évidemment, quitte à faire déménager ses voisins.

Année : 1999
Origine : Etats-Unis
Pépite : « To The Center »
Eat : Tacos ahogados
Drink : Mezcal Beneva (avec ver, of course)