Cette semaine sort le nouvel album de Danny Goffey, « Schtick ». Après un premier album solo plus que convaincant sorti sous le pseudo VanGoffey en 2013, le batteur de feu Supergrass revient avec 32 minutes de chansons pop à faire se remuer tous les popotins cet été.
On retrouve dans les 11 titres que composent cet album la même candeur que certains succès du célèbre groupe british dans lequel il officiait, mais aussi du Jam, du Kinks et même du Talking Heads. Savant mélange maitrisé et atemporel, on n’assiste pas ici à un retour en arrière ou « revival » à la mode. Les hommages sont présents, mais c’est bien la personnalité de Mr. Goffey qui se dégage de cet album. Ses compositions traitent de sujets moins personnels, plus en lien avec le quotidien et l’actualité. On passe tantôt de la religion dans Ancient Text, à l’influence néfaste des émissions de télé-réalité dans Television. Les thèmes un peu plus triviaux ne sont pas oubliés comme la crise de la quarantaine (I’m Done (Trying to be Young)) ou les vacances (Sick Holiday), et toujours sur un rythme entrainant. On a eu l’occasion de parler de tout ça, et bien plus, avec lui !
C’est ton deuxième album solo, le premier sous ton vrai nom, est-ce que ça change quelque chose pour toi ?
Danny Goffey : D’une certaine façon, ça ne change rien, parce que mon précédent album, je l’ai effectivement sorti sous le pseudo VanGoffey, mais le processus de production était exactement le même, c’est à dire, moi dans le studio, avec mon producteur, Simon Burt. Sur les deux albums j’ai joué et écrit la plupart des chansons. VanGoffey est presque devenu un groupe mais les gens avec qui je jouait en live ont suivi d’autres projets. Du coup pour celui-ci, on a fait plus simple et j’ai choisi d’utiliser mon nom. J’aimerais avoir un meilleur nom, du style Nick England !
Au niveau de la production, tu as tout fait toi-même ?
DG : En grande partie oui. Simon a un peu joué ici et là, un de mes amis, Louis Eliot (NDLR : du groupe Rialto) est venu jouer des parties de guitare un peu plus intéressantes que ce que je faisais. Parce qu’il faut le dire, je suis un batteur qui a ensuite appris à jouer de la guitare et de la basse. J’ai fait les parties de basse sur l’album mais les parties de guitare lead sont un peu trop dures pour moi. Je commençais avec une partie de guitare acoustique, puis je rajoutais une partie de batterie par dessus, puis la basse et la guitare rythmique, comme Prince enregistrait ! Je suis le nouveau Prince ! (rires)
Il était bon batteur !
DG : Oui ! Paul McCartney était aussi bon batteur, Elliott Smith pareillement. Je trouve que pouvoir jouer de tout est la seule façon d’être sûr d’avoir la personnalité que l’on veut sur un morceau. Peut-être un truc lié à ma volonté de tout contrôler.
Et donc le titre de l’album, Schtick, que signifie t-il ?
DG : Ça sonne très allemand, non ? Moi je l’utilise pour décrire le truc de quelqu’un, sa sorte de « routine » personnelle. Par exemple, un mec qui viendrait toujours aux soirées habillé de la même façon, ce pourquoi la personne est connue peut-être.
C’est un peu ce qui décrit les chansons de cet album, des morceaux sur les petites choses de la vie, qui marquent malgré tout ?
DG : Oui. Mon premier album était plutôt une collection de chansons qui avait beaucoup à voir avec mon style de vie. C’était plus personnel, lié à comment je me sentais, les difficultés d’être père, comment gérer ça, le stress, etc. Mais d’une façon assez comique, humoristique. Ce nouvel album a plutôt sa propre identité, ses propres thèmes. C’est lié à comment je compose je pense. Si quelque chose m’intéresse, j’écrirai clairement à propos de ça, plutôt que d’être ambigu. Ça ça marche pour pas mal d’artistes, mais de mon côté je crois que j’ai besoin d’expulser tout ça directement. Il y a par exemple un morceau sur la violence gratuite…
Un sur la télévision…
DG : Oui, celui-ci parle des gens qui regardent un peu trop la télé en pyjama dans leur canapé et les programmes télé sont tellement nuls qu’un jour ça va les tuer. C’est sur ce genre d’émission qu’on a au Royaume-Uni en ce moment, des trucs de télé-réalité parfois tellement voyeuristes, comme ces gens qui font rentrer des caméras dans leur maison, etc. Il y a un aspect vraiment négatif à tout ça.
En parlant d’écran, dans le clip de Sick Holiday, est-ce que ce sont des acteurs ou des « vraies » personnes qui jouent ?
DG : Ce sont de vraies personnes ! La chanson parle plus de ce qui se passe en vacances lorsqu’on est adolescent, mais je me suis dit que ce serait cool de faire la vidéo avec des adultes. On a auditionné des acteurs, mais ils avaient peur pour leur carrière en tournant ivres. Du coup on a donné £1000 à des gens pour qu’ils s’amusent. La moralité un peu de cette chanson c’est de montrer les vacances comme ce moment marrant où l’on perd un peu le sens des réalités et à la fin on appelle notre mère pour qu’elle vienne nous chercher. Le problème dans la vidéo c’est qu’on est effectivement tous un peu trop partis en dehors de la réalité et qu’on est devenu ce groupe de six anglais saouls en train de se filmer. Mais on peut y trouver un côté artistique !
Tu ne parles donc pas des vacances dans I’m Done (Trying to be Young)…
DG : Pas vraiment, c’était plutôt une sorte de mini-révélation que j’ai eu pendant une soirée lors de la tournée du dernier album. On était tous en train de se saouler et plein de gens sont arrivés, genre travestis et tout. On sentait que ça allait partir en soirée un peu folle. Le groupe a décidé de suivre et j’ai préféré rentrer tranquille. Et cette chanson parle de cette soirée précise, quand j’ai décidé d’aller me reposer plutôt que de faire la fête.
À propos de Supergrass, est-ce que tu composais déjà beaucoup à cette époque ou est-ce apparu après la séparation du groupe ?
DG : Maintenant c’est moi à 100%, c’est clair, mais je composais déjà beaucoup avant. Par exemple sur I Should Coco, j’ai écrit peut-être la moitié des morceaux. Caught by the Fuzz, Mansize Rooster, Sitting Up Straight, She’s So Loose, Sofa of my Lethargy, etc. c’était mon type de chansons, tu vois. Pas vraiment ce qu’est devenu Supergrass ensuite, un peu plus tranquille, groovy. Je pense que c’était plutôt le truc de Gaz ça. Et c’est ce qu’il fait maintenant en solo. Mais moi j’écris naturellement ces chansons pop de 3 minutes. Et maintenant c’est génial parce que je le fais pour moi et je n’ai pas à négocier avec le reste du groupe. Quand on a créé Supergrass, on avait tous la même vision, on s’amusait simplement puis on a évolué et c’était plus dur pour moi d’amener mes chansons. Maintenant on a grandi et en solo je n’ai personne qui me dit « C’est trop bizarre », « C’est trop politique », j’écris juste ce dont j’ai envie.
Vous êtes toujours en bons termes Gaz Coombes et toi ?
DG : Oui, d’ailleurs l’année dernière, on a joué ensemble à la Philharmonie de Paris. Mon ami Ed Harcourt devait monter un groupe pour jouer Sgt. Peppers Lonely Hearts Club Band des Beatles du début à la fin et on s’est retrouvé avec Carl et Pete des Libertines qui chantaient, Paul Duffy de The Coral qui jouait de la basse et j’ai demandé à Gaz de participer à ça. C’était d’ailleurs un peu mon rôle dans le groupe, trouver des plans pour faire des choses intéressantes.
Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ?
DG : Pas énormément de musique. J’essaie de m’habituer à écouter de la musique sur Spotify. Je viens juste d’arrêter d’acheter de la musique en ligne sur iTunes, tout le monde était étonné que je fasse encore ça. Mais sinon j’écoute beaucoup Radio 6 sur la BBC quand je cuisine ou que je me balade. Et il y a aussi ce super groupe de Cardiff et Bristol, qui s’appelle Junior Bill et qui fait un peu du Elvis Costello des débuts.
J’ai vu qu’ils jouaient au festival que tu organises pour la sortie de ton album, Goffstonbury.
DG : Oui, j’ai réussi à les faire venir. Ça va être cool, ça se passe chez moi, il y aura 300 personnes qui font la fête. Le nom est un jeu de mot un peu débile, mais il y aura six ou sept groupes qui vont jouer, des tonnes de nourriture, des bars, des fées qui lanceront de la poudre féérique sur les gens, des trucs marrants. Un tout petit Glastonbury dans mon jardin, comme j’habite à Frome, près du lieu du festival (NDLR : le festival Glastonbury n’a pas lieu cette année).
Quels sont tes projets pour les mois à venir ?
DG : Ça dépend de comment l’album est reçu, mais j’adorerais venir jouer à Paris, je n’ai jamais joué mes propres morceaux ici. Je joue à quelques festival au Royaume-Uni, on va voir comment ça se passe ! Peut-être que l’année prochaine l’album se vendra bien et on pourra faire une tournée, française, ça serait top.
Question subsidiaire, est-ce que l’équipe d’Angleterre va gagner la Coupe du Monde de foot ?
DG : Ça dépend un peu de mon taux d’alcoolémie, mais si j’avais bu la moitié d’une bouteille de vin, je te dirais que l’équipe d’Angleterre peut gagner, ouais. La France est pas mal cette année ! Je supporte Tottenham et Lloris est leur goal. Il vous a sauvé contre l’Australie ! Je pense réellement que l’équipe d’Angleterre est une des meilleures équipes qu’on a depuis longtemps et qu’on a une chance de gagner la Coupe du Monde. Mais il va y avoir des surprises, il y a toujours des surprises.
Schtick sort le vendredi 22 juin 2018 sur Distiller Music. Il sera disponible sur toutes les plateformes de streaming et en vente chez tous les bons disquaires.